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Inceste: Le "syndrome d'aliénation parentale", concept controversé dans le viseur de la Ciivise

Blurred sad boy leaning open hand against glass door. (Photo: RinoCdZ via Getty Images)
Blurred sad boy leaning open hand against glass door. (Photo: RinoCdZ via Getty Images)

INCESTE - C’est un concept controversé qui constituerait un “obstacle majeur” dans la lutte contre l’inceste. Appelé “syndrome d’aliénation parentale”, son recours doit être proscrit, estime la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise), qui a rendu ce mercredi 27 octobre un avis pour “mieux protéger les enfants”.

En plus des trois recommandations formulées dans cet avis, la Ciivise revient sur ce concept non scientifique qui prétend que la mère manipule l’enfant pour qu’il refuse de voir l’autre parent. La commission explique en effet avoir reçu des “appels à l’aide” de centaines de mères ayant révélé des violences sexuelles commises sur l’enfant par le père. Et a constaté que celles-ci sont souvent suspectées de manipuler leur enfant pour nuire à leur conjoint, le plus souvent dans le contexte d’une séparation.

D’où vient ce concept?

À l’origine de ce concept qui n’est pas reconnu par l’Organisation mondiale de la santé, un psychiatre américain lui aussi très controversé: Richard Gardner. Dans les années 80, celui-ci “cherchait la notoriété. Mentant sur ses titres, il a écrit toutes sortes d’articles qu’aucune revue n’a accepté de publier et a fini par éditer tout son travail à compte d’auteur”, note l’auteur d’une enquête sur l’inceste et la pédocriminalité, Patric Jean, dans une tribune sur Le HuffPost.

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Connu, entre autres, pour son indulgence envers la pédocriminalité, le psychiatre “invente alors un véritable bouclier pour protéger les auteurs de crimes pédophiles dans le cadre familial: le syndrome d’aliénation parentale. L’idée est simple: lorsqu’un homme est accusé d’inceste, il est très probablement innocent et les agressions imaginaires sont le résultat d’un endoctrinement de la mère pour s’attribuer la garde des enfants. Face à tout signalement d’abus sexuel sur un enfant, il serait toujours plus probable que ce soit la mère la vraie coupable, manipulatrice et perverse”, explique Patric Jean.

En France, c’est le psychiatre et sexologue Paul Bensussan qui aurait imposé ce concept, comme le souligne Mediapart. Avec des procès d’une ampleur médiatique considérable comme celui de l’affaire d’Outreau en 2005, ce syndrome émerge dans le débat public.

Pourquoi fait-il polémique?

Néanmoins, pour la Ciivise, ce “pseudo-concept” “accrédite l’idée que dans la plupart des cas de séparations conjugales conflictuelles, le parent avec qui vit l’enfant, c’est-à-dire la mère le plus souvent, ‘lave le cerveau’ de l’enfant pour que celui-ci refuse de voir son autre parent, le père le plus souvent”.

En d’autres termes, cette théorie est employée dans le but de démontrer que l’enfant est manipulé par l’un des parents, contre l’autre parent.

Dans son avis, la Ciivise donne plusieurs exemples permettant de mieux appréhender ce syndrome. Celui d’une mère ayant quitté son mari après des violences conjugales et qui dépose une plainte après que sa fille de quatre ans a révélé à des professionnels de la santé les violences sexuelles infligées par son père. Malgré des témoignages accablants, le père obtient un temps de visite plus important que la mère.

Une mère, citée dans l’avis, a quitté son mari après des violences conjugales. À quatre ans, sa fille révèle à des professionnels de santé et de l’Éducation nationale les violences sexuelles que lui inflige son père. La mère dépose une plainte, classée sans suite. Un an après, la fillette refait les mêmes révélations à sa maîtresse. À sa mère elle confie “J’ai envie de mourir parce que c’est trop”. À la question “pourquoi?”, elle répond ”à cause de papa”. Le juge pour enfants confie la fillette à l’aide sociale à l’enfance. Le père a obtenu trois heures de visite tous les quinze jours, la mère ne peut la voir que 45 minutes, avec un médiateur.

Autre exemple provenant également d’une mère, d’un garçon de cinq ans cette fois. Celui-ci dit à une psychologue: “papa m’a fait des chatouilles dans les fesses le soir, je suis triste, très très triste”. La psychologue lui répond: “c’est ta maman qui t’a dit de dire ça?”

“Une immense majorité des témoignages qui nous ont été transmis font état de ce même mécanisme: en dépit des révélations de l’enfant, ce n’est pas le père qui est mis en cause, mais la mère, accusée de manipuler son enfant”, souligne la Ciivise.

Quelles conséquences?

Aujourd’hui, le syndrome d’aliénation parentale continue à être utilisé par la justice. “L’aliénation parentale est reconnue dans des dizaines de jugements de la CEDH et dans des centaines d’expertises, en France et des milliers dans d’autres pays”, selon Olga Odinetz, fondatrice et présidente de l’association Acalpa, contactée par 20 Minutes. Il est souvent invoqué par des avocats de la défense, selon Me Rodolphe Costantino, spécialiste de la protection de l’enfance, contacté par La Croix.

Le 6 octobre 2021, le Parlement européen s’est prononcé contre l’utilisation du concept. Il souligne notamment que l’OMS tout comme l’American Psychological Association (APA) rejettent son usage car il peut ”être utilisé comme stratégie contre les victimes de violence en remettant en cause les compétences parentales des victimes”. Il conclut par ailleurs que ce concept d’aliénation peut “nuire aux femmes victimes de violences conjugales” et qu’il “met en péril les droits et la sécurité de la mère et des enfants”. Il invite donc “les États membres à ne pas reconnaître le syndrome d’aliénation parentale dans leur pratique judiciaire et à décourager voire interdire son utilisation dans les procédures judiciaires, notamment lors d’enquêtes visant à déterminer l’existence de violences”.

En France, on estime entre 5 et 10% le nombre de Français victimes d’inceste. Depuis l’explosion de l’affaire Duhamel, les témoignages ne cessent d’affluer et montrent à quel point ces violences sexuelles sont monnaie courante. Dernièrement, le rapport Sauvé, qui concernait cette fois l’Église et non pas la sphère familiale, a lui aussi rendu compte de l’ampleur de la pédocriminalité.

À voir également sur Le HuffPost: 4 conseils pour armer ses enfants contre les violences sexuelles

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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