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Emprise: quels sont les signaux qui doivent alerter?

Thibaud MORITZ © 2019 AFP

Rabaissement, insultes, menaces... L'emprise au sein du couple ne passe pas toujours par de la violence physique, ce qui peut la rendre plus difficile à déceler. Des signaux d'alerte existent toutefois, qui peuvent être remarqués par des proches comme par la victime, alors qu'un processus complexe se met en place, souvent caractérisé par un sentiment de mal-être et d'hypervigilance.

Combattre les idées reçues sur les violences conjugales

Louise Delavier, directrice des programmes de l'association En avant toutes, explique à BFMTV.com qu'il faut dans un premier temps déconstruire les clichés autour des violences conjugales afin de déterminer que l'on est victime d'emprise. "Dans l'imaginaire, les victimes de violence conjugales concernent pour beaucoup des femmes mariées, avec des enfants", explique-t-elle, alors que l'association a été fondée pour répondre à un manque de sollicitation des associations déjà existantes par les jeunes femmes.

Dans les campagnes de lutte contre les violences faites aux femmes, sont souvent mises en avant des images de violences physiques, avec des "femmes couvertes de bleus" ou "au sol, alors qu'un homme sert le poing", souligne-t-elle. Pourtant, "les violences au sein du couple ne ressemblent pas forcément à cela".

Analyser les différentes phases de l'emprise

L'association En avant toutes explique que les violences conjugales "n'arrivent jamais d'un coup", qu'il s'agit au contraire d'un cheminement "extrêmement progressif", qui débute par une phase de séduction, "où tout se passe très bien, c'est même presque trop beau pour être vrai", explique Louise Delavier. Puis vient un "climat de tensions", où la victime va commencer à avoir peur de ses gestes ou de ses paroles, pour que les disputes ne reviennent pas.

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Les violences arrivent dans un troisième temps, avant un moment où la tension "va se relâcher", où l'agresseur va "trouver des excuses, des justifications" à son comportement tout en se dédouanant. Une dernière phase, celle dite de la "lune de miel", clôt le cycle. Dans cette phase, l'agresseur accède à des demandes de la victime qu'il refusait jusque là, comme avoir un enfant ou encore emménager ensemble.

C'est durant cette dernière phase que "l'emprise se resserre, avec davantage d'engagement" au sein du couple, note Louise Delavier. Car "le cycle se répète, de plus en plus vite", explique-t-elle. L'estime psychologique de la victime est alors "détruite progressivement", et "l'auteur va gagner l'ascendant", et la victime perdre son indépendance.

Déceler ce que l'on perd

Sophie Lambda, illustratrice et auteure d'une BD Tant pis pour l'amour, ou comment j'ai survécu à un manipulateur dans laquelle elle livre un témoignage sur la relation sous emprise dont elle a été victime par le passé, estime sur BFMTV qu'il faut se poser la question de ce que l'on perd dans une relation.

"Est-ce qu'on perd des amis, de la famille, un travail, une vie sociale?", s'interroge-t-elle.

Sophie Lambda avait tout quitté, et notamment sa vie à Montpellier, pour suivre son compagnon à Paris. "J'ai tout perdu", témoigne-t-elle, même si heureusement, à l'issue de cette relation, elle les a retrouvées depuis.

"Confronter" l'autre

Sophie Lambda conseille également de "confronter" la personne à l'origine de l'emprise lorsqu'elle tient "des propos qui peuvent nous paraître parfois un peu incohérents". Elle raconte notamment les moments où la personne avec qui elle partageait sa vie lui disait qu'elle "méritait mieux" dans son travail ou ses amitiés.

"On me séparait de toute ce que j'avais en me faisant croire que ce que j'avais n'était pas assez bien pour moi", relate-t-elle. "C'est là où est le vice", avec quelqu'un qui "nous fait croire qu'il veut notre bien" tout en "nous emmenant vers le fond". Elle conseille alors de "faire attention" et de se poser les bonnes questions face à ces remarques.

Se rendre compte de ce que l'on vit

Marlène Frich, consultante conjugale, clinicienne du couple et formatrice, estime qu'il arrive "dans la plupart des cas" qu'une victime de violences conjugales réponde qu'elle "aime" la personne avec qui elle partage sa vie. Si "la conception de l'amour est très relative" et "dépend de chacun", une telle réaction "légitime" l'infraction et l'"excuse", explique-t-elle sur BFMTV. "Après (la victime) s'auto-accuse".

La consultante conjugale estime que face à cela, il est important que la justice rappelle aux victimes que ce qu'elles ont subi est "interdit", même si "elles le savent". "C'est très important d'accompagner" les victimes qui "n'existent que par leur partenaire".

Me Céline Marcovici rappelait jeudi sur BFMTV qu'il n'y a pas de définition légale de l'emprise à proprement parler. Cela peut se caractériser par "une contrainte morale, une sorte de pression, de violence psychologique".

"C'est votre moment, le moment de dénoncer", conseille-t-elle à ses clientes victimes de violences conjugales. Mais lorsqu'il n'y a pas de mesure d'éloignement ou d'injonction de soin du mis en cause quand il est reconnu coupable des faits qui lui sont reprochés, la victime est "un peu livrée à elle-même", note l'avocate.

Les victimes ont toutefois souvent peur de mettre des mots sur ce qu'elles vivent, et se sentent aussi parfois fautives, conséquence directe du sentiment de dévalorisation insufflé par l'auteur des faits.

Les proches, aide fondamentale aux victimes

Si la justice permet parfois de poser un cadre et faire comprendre aux victimes qu'elles vivent une situation anormale et dangereuse, les proches peuvent également les aider, même si la victime d'emprise se retrouve souvent isolée. C'est justement ce dernier point qui doit attirer l'attention de ses amis ou de sa famille, qui peuvent notamment se demander "s'il est encore possible de voir" la victime ou si elle est isolée, ce qui est un premier point de vigilance à prendre en compte, explique Louise Delavier.

L'entourage peut aussi observer s'ils décèlent un changement de personnalité, comme le fait de se dépêcher de partir afin de rentrer "à l'heure", un changement dans sa manière de s'habiller ou dans son attitude. "Ces signes sont très importants", explique Louise Delavier. Un sentiment que son proche est "triste" ou qu'il "trouve beaucoup d'excuses" à son agresseur, est également un signal d'alerte. Il faut également savoir se montrer à l'écoute et valoriser la victime avant de passer le relais à des professionnels.

S'entourer de professionnels

Elle appelle toutefois à être vigilant quant à la temporalité de la victime, qui est différente de celle de son entourage. La victime peut effectivement "avoir besoin de plus de temps" pour réaliser. Une fois la situation de la victime connue de ses proches, il est important de l'enjoindre à s'entourer de professionnels, qui pourront la prendre en charge.

Louise Delavier conseille aux proches de proposer aux victimes de téléphoner au 3919, le numéro de téléphone pour les femmes victimes de violences, ou bien de les orienter vers le tchat en ligne créé par l'association En avant toutes, sur le site commentonsaime.fr. Le nom du site, "comment on s'aime", n'évoque pas la notion de violence conjugale, mais invite plutôt à "parler de son couple, de sa relation" amoureuse, explique Louise Delavier.

Article original publié sur BFMTV.com