En vue de 2022, Macron multiplie les cadeaux de fin de mandat
POLITIQUE - “Tout le monde sait qu’on est en campagne”, reconnaissait un membre important de la République en marche cette semaine. À sept mois de la présidentielle, et sans candidat déclaré, les dernières mesures du quinquennat sont scrutées de près. Ces derniers jours, les annonces ont été nombreuses pour telle ou telle catégorie de la population, comme s’il fallait les choyer afin de récupérer des voix précieuses dans une élection encore incertaine.
Après avoir dit “il n’y a pas d’argent magique” et tenté de rester un président rigoureux sur le plan budgétaire, la crise sanitaire a fait voler en éclat cette doctrine appliquée par de nombreux gouvernements successifs, de droite comme de gauche. Aujourd’hui, et alors que la crise s’éloigne, c’est une sorte d’entre-deux qui se dessine: sortir progressivement du “quoi qu’il en coûte”, mais ménager les Français par des annonces qui ressemblent souvent à des cadeaux de dernière minute.
Ce qui n’a pas manqué de faire réagir la candidate à la primaire de la droite, Valérie Pécresse. “Emmanuel Macron est en train de cramer la caisse!”, a prévenu l’ancienne ministre du Budget de Nicolas Sarkozy. Ce qui lui a été reproché par une grande partie de la Macronie, à commencer par son successeur à Bercy, Olivier Dussopt, qui rappelle que sa région a profité de “1,4 milliards de prêts/avances en 2020”. “Nos mesures ont permis aux entreprises et aux collectivités de traverser la crise et de bien mieux redémarrer qu’en 2010-2011”, a-t-il également taclé.
Étonnant! Surtout après avoir demandé (et obtenu) 1,4Mds€ de prêts/avances en 2020 pour Île de France Mobilités et en revendiquant 1,3Mds en 2021.
Nos mesures ont permis aux entreprises et aux collectivités e traverser la crise et de bien mieux redémarrer qu'en 2010/2011.CQFD... https://t.co/kqucxj0r9s— Olivier Dussopt (@olivierdussopt) September 18, 2021
Ce dimanche 19 septembre, invité du Grand jury RTL-LCI-Le Figaro, Xavier Bertand disait avoir chiffré avec son équipe les dépenses des “quinze derniers jours” à un montant ”entre 5 et 7 milliards d’euros dépensés”. “Emmanuel Macron fait campagne avec le chéquier de la France”, lançait, de manière très virulente, le candidat à la présidentielle.
Emmanuel Macron fait campagne avec le chéquier de la France.
Le « quoi qu’il en coûte » est terminé pour les Français mais il ne fait que commencer pour la campagne d’Emmanuel Macron. En 15 jours, entre 5 et 7 milliards d’euros ont été dépensés. #LeGrandJurypic.twitter.com/IvVZlb4Gx8— Xavier Bertrand (@xavierbertrand) September 19, 2021
Même le président de la Cour des comptes, l’ancien ministre socialiste, Pierre Moscovici a mis sa voix au chapitre en estimant que la situation est “beaucoup trop fragile pour (...) se lancer dans une surenchère de promesses de dépenses ou de baisses d’impôts”.
Mise entre parenthèses, la limite de 3% de déficit public par rapport au PIB ne sera pas respectée dans le projet de budget pour 2022 qui sera dévoilé mercredi par le gouvernement et frôlera les 5%, après les 8,4% attendus pour cette année. Voici le tour d’horizon des annonces et cadeaux de dernière minute (à la date de ce samedi 18 septembre) du quinquennat Macron.
Un déplacement de trois jours, des rencontres et des annonces pour la ville de cœur du président. Le 2 septembre, Emmanuel Macron a sorti le carnet de chèque pour la ville socialiste. 1,5 milliard d’euros supplémentaires, notamment pour les transports, la sécurité et la culture dont les tournages de cinéma. Sans oublier la rénovation de 174 écoles, pas encore budgétée.
Avec son plan “Marseille en grand”, présenté en grande pompe devant le palais du Pharo, le président s’est fait des soutiens dans la cité phocéenne où il a promis de revenir en octobre et en février pour un premier bilan, cette fois-ci peut-être officiellement candidat.
Le président investit le champ de la sécurité et du régalien depuis le début de son mandat. Le Beauvau de la sécurité a été lancé pour tenter d’apporter des réponses au malaise grandissant parmi les forces de l’ordre et à leur manque de moyen. En juillet, Jean Castex avait annoncé 900 millions d’euros. Ce sont désormais 500 millions de plus qui sont prévus pour l’application du plan pour la police dès 2022.
Au programme, de nouveaux uniformes, mais pas seulement. Emmanuel Macron a promis de “doubler sur dix ans” la présence des policiers sur le terrain, des formations pour la lutte contre les violences faites aux femmes, et une formation plus longue pour les nouveaux entrants. Un vrai programme de candidat qui se projette sur “la police de 2030″, annoncé à Roubaix, dans le Nord, le 14 septembre.
Le dispositif “ma prime rénov” est victime de son succès. Les 2 milliards prévus par le plan de relance sur deux ans ont tous été absorbés en 2021. Ce sont donc 2 milliards supplémentaires qui sont mis sur la table par le Premier ministre Jean Castex pour 2022.
Le 15 septembre, il a aussi annoncé une prime exceptionnelle de 100 euros pour les ménages modestes qui bénéficient du chèque énergie alors que les prix du gaz et de l’électricité augmentent. Une mesure chiffrée à 600 millions d’euros.
Le 16 septembre, Emmanuel Macron dévoilait, dans un discours aux allures de meeting, le plan du ministre délégué Alain Griset pour les travailleurs indépendants dont des baisses de cotisations, un accès plus large à l’assurance chômage et le fait que leur patrimoine personnel sera insaisissable. “Vous représentez le fil rouge de mon engagement ces dernières années, le mérite, le travail, la prise de risque et la volonté!”, ne s’est pas caché le chef de l’État, face aux représentants de 3 millions de personnes dans le pays et autant d’électeurs potentiels.
Et ce n’est pas fini. En déplacement dans les Alpes-de-Haute-Provence le 10 septembre, le président a annoncé une enveloppe de 600 millions d’euros par an pour la création d’une “assurance-récolte” qui permettra aux agriculteurs d’être indemnisés en cas d’intempéries ou de mauvaises récoltes. Une “révolution” pour le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie.
21 millions d’euros par an. C’est la coquette somme dévoilée sur France 2 par Olivier Véran le 9 septembre pour permettre le remboursement par l’Assurance maladie de la pilule et de “toutes les contraceptions féminines, sans distinction”, pour les Françaises de moins de 25 ans.
Une annonce en réaction à la baisse constatée de la contraception chez un certain nombre de jeunes femmes, notamment “pour raisons financières”, selon le ministre de la Santé. Les mineures avaient déjà accès à ce dispositif, élargi aux moins de 15 ans en 2020.
Le plan “inédit” pour les chômeurs longue durée d’Élisabeth Borne a été dévoilé le 16 septembre dans Le Parisien. La ministre du Travail promet que chacun d’entre eux, soit 1,5 million de personnes, sera rappelé par Pôle emploi “avant la fin de l’année”.
Si la plupart des mesures feront plaisir à ceux qui les reçoivent, l’opération ressemble fortement à un arrosage électoral, tous azimuts, menée tambour battant, à grands renforts de communication. Comme en campagne, le président profite de chaque déplacement pour annoncer des mesures, le plus souvent dépensières. Sauf qu’il est au pouvoir.
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Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.