Turquie: Erdogan lâchera-t-il le pouvoir en cas de défaite électorale ?

AFP - Adem ALTAN

EDITORIAL. Jamais - ou presque - un parti islamiste disposant de la totalité du pouvoir n’a accepté de le quitter volontairement après un verdict défavorable des urnes. Le scrutin législatif et présidentiel turc du 14 mai constitue donc un enjeu essentiel qui va bien au-delà de la Turquie, estime notre éditorialiste Marc Semo.

Alors que le scrutin législatif et présidentiel turc du 14 mai approche, tous les sondages donnent une nette avance à Kemal Kilicdaroglu, leader du CHP (Parti républicain du peuple) candidat commun de six partis d’opposition. Il bénéficie aussi du soutien du parti pro-kurde HDP (Parti démocratique des Peuples). Mais après vingt de règne sans partage, Recep Tayyip Erdogan et son parti AKP (Parti de la Justice et du développement) sont ils prêts à accepter une alternance ? C’est un test crucial pour une démocratie turque déjà bien mise à mal dans ce qui fut la première république laïque en terre d’islam fondée il y a cent ans par Mustapha Kemal en s’inspirant du modèle jacobin.

Lors de leur arrivée au pouvoir après les législatives de novembre 2002, Recep Tayyip Erdogan et l’AKP incarnaient un islam politique moderne mêlant religion, démocratie, business et volonté d’intégration dans l’Union européenne. À l’époque, Daniel Cohn-Bendit, figure des "Verts" européens, comme tant d’autres, dont l’auteur de cette chronique, n’hésitaient pas à saluer la "révolution du Bosphore". Le modèle turc était célébré à Washington et à Bruxelles, comme une inspiration pour les printemps arabes qui ont secoué le Moyen-orient en 2011.

A l'origine, un islam politique moderne et pro business

Au fil des ans pourtant, le Reis Erdogan, le "chef" ainsi que l’appellent ses partisans, conforté par ses succès électoraux ininterrompus, est devenu un autocrate affichant son amitié avec Vladimir Poutine et d’autres satrapes de l’Eurasie. Il a tourné le dos aux traditionnels alliés européens et américains de la Turquie sans pour autant rompre totalement les ponts.

"Recep Tayyip Erdogan veut fermer une parenthèse de deux siècles d’histoire turque avec un double revanchisme, contre le modernisme autoritaire kémaliste et contre l’Occident qui, à ses yeux, poursuit les desseins des croisés et des colonialistes", aime à rappeler Ahmet Insel, auteur de "La nouvelle Turquie d’Erdogan" (La Découverte). La [...]

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