Réforme des retraites: elle pose problème, et bien c'est normal
EDITORIAL. La France faisait preuve d'exception en terme de départ d'âge légal à la retraite dans l'Union européenne, reculé progressivement de 62 à 64 ans avec le projet de réforme présenté mardi 10 janvier. Sa remise en cause bat tous les records des réformes impopulaires. Et c'est légitime.
Une carte vaut mieux qu'un long discours. Celle publiée à l’occasion de la réforme des retraites par Le Parisien avant Noël et de la dernière édition du Journal du Dimanche convaincra-t-elle des lecteurs pas forcément sensibles au respect des grands équilibres macroéconomiques? Elle est pourtant édifiante: sur les 27 pays de l’Union européenne, 23 ont opté pour un âge légal de départ supérieur à 64 ans (dont 19 ont haussé le seuil à 65 ans), et trois seulement (Estonie, Lituanie et République tchèque) affichent 63 ans et quelques mois.
La France, une exception face aux retraites
Reste la France, seule de son espèce, accrochée au départ à 62 ans. La France qui cumule, au sein de l’OCDE, une triple exclusivité: 4 points de PIB de plus consacrés aux pensions que la moyenne de l’organisation des Etats les plus riches de la planète; quatre années supplémentaires de vie à la retraite que le même échantillon; et des revenus moyens des retraités devenus supérieurs à ceux des actifs.
Avec de tels avantages, il n’est guère étonnant que leur remise en cause batte tous les records des réformes impopulaires.
Alors comment s’y prendre? D’abord, un peu d’honnêteté sur les raisons de l’échec de la "retraite à points", si séduisante intellectuellement, n’aurait pas nui. Ensuite, quitte à se montrer pragmatique, autant l’être jusqu’au bout. Et reconnaître que si l’allongement de la durée des cotisations est la mesure la plus juste socialement, elle ne produit que de maigres résultats: à peine 3 milliards d’euros récupérés, même en accélérant radicalement le rythme initial prévu par la réforme Touraine.
Alors que le report honni de l’âge légal produit dix fois plus d’économies (avec le seuil de 65 ans), ou six fois plus (avec 64 ans). Surtout, cette mesure a des effets induits puissants sur l’activité, et les finances publiques, bien au-delà des économies générées. Avec la réforme Woerth de 2010, qui a fait passer l’âge légal de 60 à 62 ans, le taux d’emploi des seniors (55-65 ans) a[...]
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