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En Polynésie, Macron veut "assumer" les conséquences des essais nucléaires, mais il aura beaucoup à faire

Un sit-in contre les essais nucléaires devant le mémorial des victimes de la guerre organisé le 2 juillet 2021 à Papeete, capitale de la Polynésie française. (Photo: SULIANE FAVENNEC via AFP)
Un sit-in contre les essais nucléaires devant le mémorial des victimes de la guerre organisé le 2 juillet 2021 à Papeete, capitale de la Polynésie française. (Photo: SULIANE FAVENNEC via AFP)

POLITIQUE - “Alors Manu, tu assumes?”. La question acerbe, posée sur une banderole suspendue sur le monument aux morts de Papeete le 2 juillet, résume bien les crispations locales sur le dossier des essais nucléaires menés à partir des années 60 en Polynésie française. Emmanuel Macron, en visite dans l’archipel à partir de ce samedi 24 juillet, ne pourra pas faire l’impasse sur le sujet.

“La question nucléaire est particulièrement prégnante en Polynésie française”, reconnaît-on à l’Élysée en amont de la visite présidentielle. C’est peu dire. Chaque année, des manifestations sont organisées le 17 juillet pour commémorer l’essai atmosphérique le plus polluant, Centaure, effectué à la même date en 1974. Une plainte a même été déposée en 2018 devant la Cour pénale internationale contre la France pour crimes contre l’humanité.

Cette année, la manifestation rassemblé plus de 2000 personnes à Papeete, selon la police — le triple, selon les organisateurs — quatre mois après la parution d’un livre-enquête, Toxique, qui a ravivé la colère locale et forcé le gouvernement à s’emparer du sujet.

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“60 ans de propagande d’État, de déni, d’intimidation, de mépris et d’arrogance”

En tout, ce sont 193 essais nucléaires qui ont été menés entre 1966 et 1996 en Polynésie française.

Selon l’enquête menée par le média d’investigation Disclose, les taux de radioactivité reçue par certains Polynésiens à la suite des six essais les plus contaminants ont été largement sous-évalués — parfois volontairement- par le Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Tout comme le nombre de personnes touchées, à savoir “la quasi-totalité de la population des archipels à l’époque”. Encore plus embarrassant pour le gouvernement français: un rapport — le premier du genre — fait le lien entre ces essais nucléaires et les nombreux cancers observés parmi la population.

Cette relation de cause à effet avait jusqu’alors été fermement niée par le haut commandement français. Or, “selon nos données de la Caisse de Prévoyance Sociale (CPS, la sécurité sociale locale, NDLR), les femmes polynésiennes, entre 40 et 50 ans, ont le taux de cancers de la thyroïde le plus important du monde” a déclaré à l’AFP Patrick Galenon, ancien président du conseil d’administration de la CPS.

Depuis ces révélations et le tollé local qu’elles sont suscitées, les échanges se sont multipliés entre Paris et Papeete qui rappelle “le devoir de vérité et de justice de l’État vis-à-vis des Polynésiens”.

En mai, le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu s’est rendu sur place pour préparer le terrain: une table en ronde fin juin à Paris — une demande du président polynésien Édouard Fritch, finalement boycottée par les deux principales associations anti-nucléaires - , puis la visite d’Emmanuel Macron. “Nous n’avons pas peur de la vérité, au contraire, nous la voulons, et surtout nous souhaitons assumer”, avait alors affirmé le ministre.

Mais sur place, l’heure n’est plus aux déclarations de forme. Même le président polynésien, autonomiste et en bons termes avec la France, a tenu un discours moins policé qu’auparavant. “On n’efface pas d’un revers de main soixante ans de propagande d’État, de déni, d’intimidation, de mépris et d’arrogance”, a-t-il déclaré lors d’une réunion avec Sébastien Lecornu, avant d’inviter au dialogue.

Si Macron “ne demande pas pardon, il sera venu pour rien”

Plus que jamais, Polynésiens réclament des “actes concrets pour qu’enfin ce débat sur le nucléaire soit apaisé”, a déclaré Édouard Fritch en mars après la parution de l’enquête de Disclose. Mais même l’obtention de la requête la plus symbolique n’est pas garantie.

De quoi s’agit-il? Tout simplement d’excuses explicites de la part de l’État. La demande est particulièrement réclamée par les indépendantistes pour lesquels, si le président ne fait pas ce geste lors de sa visite, alors “il sera venu pour rien” selon le député Moetai Brotherson. L’inscription de “la reconnaissance du fait nucléaire dans la Constitution” est aussi réclamée par la délégation polynésienne Reko Tika qui a participé à la table ronde début juillet.

Emmanuel Macron y répondra-t-il favorablement? Lors des discussions à Paris, la ministre chargée de la Mémoire et des Anciens combattants Geneviève Darrieusseq a exclu un pardon de la France. À l’Élysée, on se contente de mettre en avant le “dialogue étroit et transparent qui s’est noué début juillet”, tout en reconnaissant un manque de communication jusqu’alors sur ce dossier.

La balle est dans le camp de Macron

“Le président aura à cœur de rappeler ce dialogue, de le promouvoir et de l’encourager avec des actions très concrètes, tant sur la question de la mémoire que sur les questions d’indemnisations individuelles ou alors plus collectives de réparation”, assure le Palais, sans pour autant se risquer sur des éléments précis.

Les doléances des Polynésiens sont pourtant très clairement énoncées: prendre en compte les effets des essais nucléaires sur la santé des habitants, en facilitant l’accès aux soins et les indemnisations, prendre en compte les retombées environnementales et y remédier dans la mesure du possible, et enfin “faciliter et ”élargir l’accès aux archives” du nucléaire.

À l’issue de la rencontre à Paris, les réactions de la délégation polynésienne étaient en demi-teinte. Seule l’ouverture des archives a été confirmé, à l’exception de celles jugées compromettantes pour la sûreté nationale. Le ministre de la Santé Olivier Véran s’est lui engagé à financer la recherche sur les cancers de la thyroïde et faciliter les indemnisations des victimes en simplifiant les démarches administratives. La question du remboursement des frais avancés par la collectivité pour les soins des victimes a aussi été jugée “légitime”.

Dans une lettre au président polynésien le 7 juillet, le premier ministre Jean Castex a assuré “avoir donné des instructions pour que ces mesures pratiques (…) fassent l’objet d’une mise en place rapide et concrète dans les semaines à venir.” Avant de renvoyer, tout comme les ministres des Outre-mer, de la Santé et de la Mémoire, à la venue d’Emmanuel Macron sur place pour des annonces plus importantes.

La balle est donc définitivement dans le camp du chef de l’État. Selon les médias polynésiens, Emmanuel Macron devrait attendre mardi 27 juillet, veille de son départ de l’archipel, pour s’exprimer sur le nucléaire. Mais cet agenda pourrait être perturbé: l’association 193, une des plus importantes sur le dossier, a appelé la population à venir accueillir le président.

À voir également sur Le HuffPost: L’évolution de la centrale nucléaire de Fukushima, 10 ans après la catastrophe

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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