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Le pass vaccinal a-t-il vraiment relancé les injections de premières doses?

SCIENCE - “Il n’est pas admissible que le refus de quelques millions de Français de se faire vacciner mette en risque la vie de tout un pays”. C’est ainsi que Jean Castex justifiait la transformation du pass sanitaire en pass vaccinal le 17 décembre, alors que le variant Omicron, en sous-marin, prenait le pas sur Delta et allait faire exploser les cas de Covid-19.

Il a fallu près d’un mois d’âpres débats parlementaires, entrecoupés de suspensions de séances et d’une violente charge d’Emmanuel Macron contre les non-vaccinés, qu’il souhaite “emmerder” jusqu’au bout, pour que le projet de loi ouvrant la voie à la mise en place du pass vaccinal soit voté définitivement à l’Assemblée, ce dimanche 16 janvier.

Le gouvernement souhaite une entrée en vigueur de la transformation du pass sanitaire autour du 20 janvier. En mettant la pression sur les non-vaccinés, le gouvernement affirme chercher à contraindre les 4,9 millions de Français de plus de 12 ans qui n’ont pas sauté le pas.

La menace du pass vaccinal a-t-elle déjà eu un impact? Le 5 janvier, Olivier Véran se félicitait devant l’Assemblée nationale que “66.000 nouvelles primo-injections” aient été enregistrées, une hausse notable. “Si nous faisons cela pendant 70 ou 75 jours, nous aurions une protection complète de la population contre les formes graves”, lançait le ministre de la Santé.

Une hausse en partie liée aux enfants

Les calculs d’Olivier Véran ne sont pas faux... mais ils ne sont pas vraiment justes. Certes, depuis l’annonce du pass vaccinal par Jean Castex, une hausse des injections de première dose a été notée (même si les vacances et les deux jours fériés ont ralenti le rythme). Mais il y a autre chose qui dope la vaccination depuis la mi-décembre: l’ouverture aux enfants entre 5 et 12 ans.

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Comme on peut le voir sur le graphique ci-dessous, si 66.000 primo-injections ont bien été dénombrées, 20.000 étaient destinées aux enfants. Sur les plus de 12 ans le 5 janvier, 38.000 premières doses ont été injectées. En moyenne (sur une semaine) sur cette catégorie de la population, nous sommes actuellement à 35.000 doses.

Il y a bien eu une hausse (ainsi qu’une stabilisation après l’allocution d’Emmanuel Macron le 9 novembre, alors que les primo-vaccinations chutaient depuis des semaines), mais celle-ci est plus légère que peuvent le laisser penser les chiffres bruts.

Avec le rythme actuel, il faudrait 140 jours pour que 100% des plus de 12 ans soient vaccinés, près du double des 70 jours évoqués par Olivier Véran. Il faudra évidemment voir quel sera l’impact de la mise en place du pass vaccinal. Pour autant, il y a de bonnes raisons de penser que cette nouvelle contrainte ne changera pas radicalement la donne.

Des non-vaccinés convaincus ou perdus

Comme nous l’expliquions dans un article cherchant à cerner les non-vaccinés qu’Emmanuel Macron voulait “emmerder”, les deux tiers des personnes sondées et non-vaccinées dans une récente étude affirment être certain de ne pas vouloir sauter le pas.

Surtout, comme nous l’expliquait l’auteur, le sociologue Jeremy Ward, spécialiste des controverses vaccinales, cette enquête n’est pas parfaite: “on sait qu’on passe à côté d’une grande partie des non vaccinés car on a de bonnes raisons de penser que parmi ces derniers, on a des publics marginalisés, par exemple des immigrés, des femmes célibataires, des personnes très pauvres. Ces types de personnes sont peu présentes dans les panels d’enquête.”

Le sociologue estime qu’il y a une minorité importante de non-vaccinés qui ne le sont pas par choix idéologique, mais aussi pour des questions d’accès. Des éléments de l’étude vont dans ce sens, rappelle-t-il: “Ceux pour qui il est très facile d’acheter des médicaments s’ils en ont besoin ont plébiscité ce vaccin. Ils sont plus de 95% à avoir été vaccinés ou à compter le faire. Cette proportion est seulement de 82% chez ceux pour lesquels il est très difficile d’acheter ces médicaments”.

Pour vacciner ces personnes, la simple coercition ne suffit pas. C’est le fameux “aller vers”, tenté de multiple manières par le gouvernement avec un succès important mais une ampleur de l’effort limitée. Il faut ainsi se rappeler par exemple que la couverture vaccinale des plus de 80 ans est plus faible que pour tous les autres adultes. “Cela montre bien qu’on n’a pas suffisamment investi dans le ‘aller vers’ en France”, regrette Jeremy Ward.

Vaccinés, mais divisés

Évidemment, il n’y a pas de solution miracle pour toucher les derniers indécis. Ni pour convaincre les anti-vaccins. “Beaucoup de choses ont été faites, ce qui est compliqué, c’est que ce sont toujours les acteurs de proximité qui ont le plus de chance de convaincre les indécis. On parle beaucoup de l’aller vers pour amener la vaccination, mais c’est aussi trouver les interlocuteurs de proximité susceptibles de convaincre ces personnes-là”, rappelle Jeremy Ward.

Or, intégrer la santé et la prévoyance localement, au sein des territoires, des associations, ne se fait pas en quelques mois, ni en pleine pandémie. Le sociologue cite en exemple les pays nordiques, “avec des taux de vaccination plus élevés que les nôtres car il y a moins de distance entre les citoyens marginalisés et le système de santé”.

Dans un article publié fin 2021, Lucie Guimier, docteure en géopolitique spécialiste des mouvements anti-vaccins, compare également le système vaccinal français, construit jusqu’alors “essentiellement sur la médecine libérale centrée sur le soin”, au système britannique, centralisé autour du NHS, un système de santé national, centralisé et gigantesque, cinquième plus gros employeur au monde.

D’ailleurs, le graphique ci-dessous, réalisé par la chercheuse Florence Debarre, met bien en lumière comment la campagne britannique a démarré plus vite et, surtout, comment les plus âgés (et donc les plus à risque) ont été plus vaccinés qu’en France.

Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’opposition au vaccin au Royaume-Uni. La France a d’ailleurs une meilleure couverture vaccinale que son voisin outre-Manche aujourd’hui. Mais ce retard a surtout été rattrapé grâce au pass sanitaire, une manière de pousser la population générale à la vaccination.

Et cela a un impact positif, visible, mais aussi plus subtil: le doute face aux vaccins touche aussi les vaccinés en France. “En juin, 9% des personnes vaccinées contre le Covid concédaient avoir eu encore beaucoup de doutes au moment de se faire vacciner. En août, on est passé à 49%”, précise Jeremy Ward, citant une de ses analyses antérieures. “Le pass sanitaire était certainement utile, mais il a poussé à la vaccination sans forcément convaincre”.

En “emmerdant encore davantage” les non-vaccinés, Emmanuel Macron affirme que cela permettra de pousser un peu plus à la primo-injection. Mais à quel prix? “Dans un contexte où la campagne présidentielle arrive, cette intervention ne vise que les soutiens du président et risque de polariser davantage la population”, tranche Jeremy Ward, qui regrette que le fond du débat, les défauts de notre système de santé publique, ne soient même pas abordés:

“Cette pandémie nous confronte aux faiblesses de nos modèles de prise en charge de santé. On cherche une solution ponctuelle, rapide, mais on restera structurellement confrontés aux limites du système actuel. Après deux ans d’épidémie, je ne vois aucune volonté politique de réforme significative du système de santé, malgré la campagne présidentielle. C’est un peu comme si on n’avait rien appris.”

À voir également sur Le HuffPost: Après Omicron, quels seront les futurs variants?

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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