Publicité
Marchés français ouverture 8 min
  • Dow Jones

    38 239,98
    +253,58 (+0,67 %)
     
  • Nasdaq

    15 451,31
    +169,30 (+1,11 %)
     
  • Nikkei 225

    37 552,16
    +113,55 (+0,30 %)
     
  • EUR/USD

    1,0650
    -0,0007 (-0,06 %)
     
  • HANG SENG

    16 797,60
    +285,91 (+1,73 %)
     
  • Bitcoin EUR

    62 493,48
    +170,73 (+0,27 %)
     
  • CMC Crypto 200

    1 401,86
    -12,90 (-0,91 %)
     
  • S&P 500

    5 010,60
    +43,37 (+0,87 %)
     

Pass sanitaire: Les points d'achoppement avant la décision du Conseil constitutionnel

Ce jeudi 5 août, le Conseil constitutionnel rend sa décision sur le projet de loi prévoyant notamment l'élargissement de l'utilisation du pass sanitaire ainsi que la vaccination obligatoire des soignants (photo d'illustration prise à l'été 2020). (Photo: LUDOVIC MARIN / AFP)
Ce jeudi 5 août, le Conseil constitutionnel rend sa décision sur le projet de loi prévoyant notamment l'élargissement de l'utilisation du pass sanitaire ainsi que la vaccination obligatoire des soignants (photo d'illustration prise à l'été 2020). (Photo: LUDOVIC MARIN / AFP)

CORONAVIRUS - Pas sûr que cela suffise à apaiser la grogne d’une partie de la population, mais au moins, le gouvernement sera fixé. Ce jeudi 5 août, dix jours après que le Sénat et l’Assemblée nationale ont réussi à trouver un compromis concernant le projet de loi prévoyant notamment l’extension du pass sanitaire et la vaccination obligatoire des soignants, le Conseil constitutionnel rend sa décision sur le texte.

Le “projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire” du covid-19, fustigé dans la rue par des centaines de milliers de personnes chaque semaine depuis qu’il est en discussion au Parlement, fait effectivement l’objet de plusieurs saisines des “Sages” de la rue de Montpensier. De la part de ses opposants comme du gouvernement de Jean Castex d’ailleurs, lequel souhaite offrir une légitimité à ce texte emblématique pour la suite de la vie à l’heure du coronavirus et du variant Delta.

Mais alors quels sont les éléments qui suscitent l’inquiétude et qui pourraient pousser le Conseil constitutionnel à censurer une partie du texte?

PUBLICITÉ
  • Un délai d’entrée en vigueur trop court

Ce premier argument est notamment porté par les 74 députés de gauche qui ont saisi le Conseil constitutionnel, après avoir tenté sans succès d’amender le texte du projet de loi à l’Assemblée nationale. Pour eux, le délai entre l’entrée en vigueur du texte, prévue le 9 août par le gouvernement, et la possibilité de se faire vacciner est trop court. Et ce même pour les citoyens “de bonne volonté” qui chercheraient à obtenir un rendez-vous.

“Pour ceux qui ont voulu entamer leur parcours vaccinal après les annonces du président de la République, le temps de prendre leur premier rendez-vous, ils ne pourront pas se faire vacciner en temps et en heure”, assure entre autres l’élu La France insoumise Ugo Bernalicis.

Et d’ajouter que sans une évolution des délais prévus par le texte issu du compromis entre députés et sénateurs, “certains Français qui veulent être vaccinés seront obligés de faire des tests PCR ou antigéniques toutes les 48 heures pour pouvoir vivre à peu près normalement en période de vacances. Il y a une rupture d’égalité flagrante”, dénonce encore le député du Nord.

  • Les sanctions envers les salariés

Ce second argument est celui de plusieurs organisations syndicales: la possibilité de sanctionner les salariés, dans certains domaines d’activité, qui ne présenteraient pas de pass sanitaire serait contraire à la Constitution.

La CGT, Solidaires et la FSU, qui se sont jointes à la saisine du Conseil constitutionnel, déplorent en effet qu’avec le pass requis pour les personnes fréquentant certains lieux et surtout les salariés y travaillant, “la loi va renforcer la subordination des salariés en octroyant aux employeurs des nouvelles dispositions disciplinaires non encadrées et ne pouvant être contrôlées ni par l’inspection du travail, ni par la médecine du travail”.

“Elle va créer ou accentuer anticonstitutionnellement de nouvelles discriminations entre salarié(s), en fonction de la nature de leur contrat de travail, du poste occupé ou de la branche professionnelle et du lieu dans lesquels ils exercent leur profession”, assurent encore les syndicats.

Faute de pass ou en cas de non-respect de l’obligation vaccinale pour les salariés concernés, la loi prévoit à l’heure actuelle une procédure de suspension du contrat de travail sans rémunération, qui prend fin lorsque le salarié produit “les justificatifs requis”. Le texte ajoute qu’un CDD pourra être rompu “avant l’échéance du terme”, sans dommages et intérêts, les contrats d’intérim pouvant aussi prendre fin prématurément. Des dispositions radicales visant à faire appliquer l’obligation de disposer d’un pass sanitaire dans certains secteurs.

  • La vaccination obligatoire des soignants

Et parmi les salariés concernés par ces nouvelles mesures du texte de loi, on retrouve le personnel soignant. Qu’ils travaillent en libéral ou dans les hôpitaux, cliniques, Ehpad ou maisons de retraite, qu’ils soient étudiants dans ces lieux ou au contact de publics vulnérables du fait de leur rôle comme pompier, ambulancier ou aide à domicile, tous les soignants doivent, selon le projet de loi, obligatoirement se faire vacciner d’ici au 15 septembre.

Une mesure qui déplaît très fortement aux syndicats du secteur, qui craignent là encore de voir une discrimination et une rupture de l’égalité entre les différents membres du personnel soignant, ainsi qu’une mesure inégalitaire en ce sens que tous les Français n’auraient pas à l’heure actuelle le même accès aux sérums.

Un élément a toutefois été inclus dans le texte par les députés et les sénateurs: la réparation des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire contre le Covid‑19 par l’Oniam (Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales). À voir si cela suffit à convaincre les Sages.

  • Quid de l’accès à l’hôpital, à certains lieux de loisir et de consommation?

Alors oui, si le pass sanitaire va devenir obligatoire pour entrer à l’hôpital, une exception a été prévue dans le texte dans le cas d’une urgence. Mais, comme l’expliquent plusieurs juristes, quid de la situation où cette urgence ne serait pas visible au premier coup d’œil? Des patients pourraient-ils être privés de soins au motif qu’ils sont porteurs d’une pathologie ou victimes d’un accident pas suffisamment explicite?

“Ce qui est en cause, c’est le droit d’accès aux soins [...] Comment déterminer que nous ne sommes pas dans une situation d’urgence sans un examen médical préalable?”, s’interrogeait à cet égard la constitutionnaliste Annabelle Pena au micro de franceinfo. Une crainte partagée par l’Ordre des médecins, qui refuse que l’instauration d’un pass sanitaire prive certains malades d’accès aux soins.

Dans le même ordre d’idée, une partie des opposants au pass sanitaire espère que le Conseil constitutionnel retoquera son extension au motif qu’il induit une discrimination entre les citoyens français. Selon eux, le fait que les plus riches soient capables de payer des tests antigéniques ou PCR, lorsqu’ils seront devenus payants à l’automne, alors que les plus pauvres ne le pourront pas (ou devront nécessairement se faire vacciner) crée de fait une discrimination au sein de la population.

Les citoyens ne disposant pas d’un pass verront également, selon les détracteurs du texte, leur liberté de circulation (dans les bars, les restaurants, les trains longue distance...) entravée. Tout comme, par extension, explique le député Aurélien Taché “la liberté d’entreprendre, de ceux qui, finalement, tiennent ces entreprises.”

  • Le pass sanitaire pour aller en terrasse

Là encore, on retrouve un point de discorde déjà aperçu durant les débats parlementaires. Au Sénat, la majorité de droite a tenté d’exempter les terrasses des bars et restaurants des contrôles de pass sanitaire. Une demande sur laquelle ils ont été rejoints par le secteur de la restauration, par la voix notamment du syndicat Umih (Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie), qui espère que le Conseil constitutionnel censurera la disposition.

L’argument ici est celui de la “disproportion” entre les besoins réels en matière de protection de la population et la lourdeur de l’application des mesures prévues par le projet de loi. Les opposants à cette mesure voient en effet ici un décalage entre la décision de rouvrir les terrasses lors du déconfinement, et celle de leur appliquer désormais les mêmes contraintes qu’aux lieux clos, où il est prouvé que le virus circule de manière beaucoup plus active.

Le gouvernement, quant à lui, a fait savoir que si la mesure n’était pas censurée par les Sages, elle serait bel et bien appliquée et que des moyens humains seraient affectés à cette tâche.

  • L’isolement des malades en question

Un autre point d’achoppement se trouve dans l’isolement obligatoire des personnes positives au virus. Dans le détail, l’article 9 du projet de loi prévoit que “les personnes faisant l’objet d’un test positif au covid-19 ont l’obligation de se placer à l’isolement pour une durée non renouvelable de dix jours.” Elles ne peuvent en outre sortir que de 10 heures à 12 heures, et en cas d’urgence, et des contrôles peuvent être diligentés avec le risque pour les contrevenants d’écoper d’une amende de 1500 euros. Une atteinte potentielle à vie privée et une privation de liberté, expliquent certains.

D’autant que la rédaction du texte manque de clarté, ajoutent les 74 élus qui attaquent le texte. Selon eux, la manière dont est écrit le texte peut donner lieu à des recours juridiques, tant et si bien que le “système judiciaire par ailleurs sous-doté” ne pourra les traiter convenablement au cœur de l’été. “Cette impossibilité d’ordre matériel rend les garanties prévues par l’article (la possibilité de saisir le juge des libertés et de la détention, ndlr) inapplicables”, pointent-ils.

  • Et aussi...

Quelques points supplémentaires pourraient faire débat et provoquer une censure partielle du texte par le Conseil constitutionnel, à en croire ses détracteurs. À l’image en particulier de l’extension de la durée de conservation des données relatives aux tests de dépistage du covid-19, qui doit passer de trois à six mois. Les 74 députés qui ont sollicité les Sages jugent cet allongement “excessif”, ajoutant qu’il porte” “atteinte au respect au droit à la vie privée protégé par la Constitution”.

D’un point de vue plus technique, il est à noter que le pouvoir laissé à la discrétion des préfets de fermer ou non des centres commerciaux de grande superficie en fonction de l’évolution de l’épidémie irrite de nombreux juristes. D’après eux, cette mesure prévue par le projet de loi rompt le principe selon lequel c’est le législateur qui doit fixer les règles permettant de réglementer l’exercice des libertés, pour donner ce pouvoir aux représentants de l’État dans les départements.

Enfin, on peut citer l’argument avancé par un avocat réunionnais contre le projet de loi au motif du non-respect des principes d’intégrité du corps humain et de l’intégrité de la personne: selon lui, le fait que les non-vaccinés puissent être contraints de se faire dépister, au contraire des vaccinés n’est en ce sens pas conforme à la Constitution. Autant d’éléments qui seront tranchés ce jeudi de manière définitive par l’institution suprême du pouvoir judiciaire de la Cinquième République.

À voir également sur le HuffPost: La liberté où je ne dois rien à personne n’existe pas”, lance Macron après les manifestations

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

LIRE AUSSI: