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Ombres chinoises sur le salon de l'automobile de Francfort

par Gilles Guillaume

PARIS (Reuters) - Les nombreuses nouveautés prévues au 66e salon de l'automobile de Francfort tenteront de faire oublier le ralentissement observé en Chine alors que le premier marché automobile mondial joue un rôle central dans l'internationalisation des constructeurs automobiles et le succès des groupes allemands.

Le salon accueillera la presse mardi et mercredi, puis le public du 19 au 27 septembre. Les organisateurs revendiquent 210 premières mondiales, soit un tiers de plus que lors de l'édition précédente en 2013.

"Malgré les problèmes des pays émergents, le salon s'ouvrira dans une bonne ambiance vu que le marché européen est reparti", commente François Roudier, porte-parole du Comité des constructeurs français d'automobiles (CCFA). "Le ralentissement en Chine et la chute du marché russe seront quand même en toile de fond de bon nombre de présentations, notamment pour les voitures de luxe."

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Les organisateurs de la grand-messe allemande prévoient une hausse de près de 6% du marché automobile européen en 2015, et une progression de 3% du marché des véhicules légers aux Etats-Unis, à son plus haut niveau en 10 ans.

En revanche, la Chine a rétrogradé et devrait croître de 4% au plus cette année, contre +7% environ attendu début 2015.

DES PROFIT WARNINGS AU SALON ?

Cette semaine, les analyses d'IHS Automotive ont révisé à la baisse leurs prévisions de ventes de véhicules légers sur le sol chinois, attendues désormais en hausse de 1,4% seulement.

"Les résultats du secteur ont atteint leur pic, une baisse se profile maintenant", ont écrit au début du mois les analystes de Bernstein Research dans une note, ajoutant que certains constructeurs pourraient utiliser la fenêtre de communication du salon de Francfort pour avertir sur leurs résultats.

Le trio allemand du premium Audi-Mercedes-BMW réalise pas moins de 30% à 50% de ses bénéfices en Chine.

"Nous pensons que 2016 sera la dernière année de hausse des volumes automobiles mondiaux", estime même Stuart Pearson, analyste chez Exane BNP Paribas. La prévision actuelle pour 2015 tourne autour de 1% de croissance.

Le ralentissement du marché chinois tombe mal également pour PSA Peugeot Citroën, dont la Chine est désormais le premier marché devant la France et joue un rôle clé dans l'internationalisation à marche forcée des ventes du groupe, ainsi que pour Renault, sur le point de produire ses premières voitures en Chine.

"Sur le moyen et le long terme, le marché automobile chinois est toujours clairement sur une trajectoire de croissance", a précisé cependant Matthias Wissmann, président de l'Association allemande de l'industrie automobile (VDA), en préambule au salon.

VITRINE TECHNOLOGIQUE

La dégradation du marché en Chine rend d'autant plus pressante la recherche de nouveaux relais de croissance, tant en termes de géographies que de nouveaux segments high-tech.

Le plus technologique des salons automobiles consacrera ainsi plus que jamais l'attraction mutuelle entre la voiture et le smartphone, ainsi que l'avancement des projets de véhicules autonomes. Il verra aussi se déployer des motorisations toujours plus économes - downsizing, biturbo et hybridation électrique - même si la chute du baril de pétrole autour de 50 dollars a allégé la pression ambiante pour faire la chasse aux consommations.

Les Allemands prévoient notamment de présenter des concurrents de la luxueuse sportive électrique de Tesla, comme la Porsche Pajun ou le concept e-tron quattro d'Audi.

Si la performance d'une voiture ne se mesure plus seulement en chevaux mais aussi en lignes de codes et en densité énergétique de batterie, les belles carrosseries tiendront toujours la vedette.

Les 7.000 journalistes accrédités pourront découvrir la nouvelle Alfa Romeo Giulia, qui compte rivaliser avec les bolides allemands grâce à son moteur V6, ou encore les très spectaculaires Bentayga, F-Pace et Levante, respectivement tout premiers SUV des marques Bentley, Jaguar et Maserati.

Côté français, outre la DS4 restylée dont la calandre a perdu à son tour les chevrons de Citroën, le concept car anguleux Fractal de Peugeot et un clin d'oeil de Citroën à la célèbre "Méhari", l'actualité se situera plutôt sur le stand Renault. Le groupe achève un vaste renouvellement de sa gamme avec la présentation de la version break de sa grande Talisman, et la quatrième génération de sa Mégane.

Loin des supercars, le segment compact reste incontournable pour les constructeurs européens. Opel (General Motors) présentera sa nouvelle Astra, avec lui aussi en ligne de mire la reine du segment, la Golf de Volkswagen.

Vitrine de la puissance automobile germanique avec 60% d'exposants allemands, le salon de Francfort est vaste comme 33 terrains de football. BMW y a construit spécialement en intérieur un manège et une piste longue de 400 mètres, tandis qu'Audi a édifié un bâtiment de trois étages pour servir d'écrin à pas moins de 33 voitures exposées au salon.

(Avec Laurence Frost et Edward Taylor, édité par Dominique Rodriguez)