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La déflation nous guette-t-elle ?

Attention : chute de prix !

Des prix perpétuellement en baisse ? A priori, ça fait rêver ! Pour autant, lorsqu'un pays entre en déflation, cela n'a rien d'une situation économique idéale, car ses effets sont désastreux sur la croissance et l'emploi. L'exemple japonais montre par ailleurs que lorsqu'un pays est embourbé dans la déflation, il lui est très difficile de s'en sortir.

En Europe, pour le moment, il n'est question que de "désinflation", c'est-à-dire une baisse de l'inflation. En 2013, l'indice des prix à la consommation n'a ainsi progressé que de 0,9% contre 2% en 2012. Pour autant, un nombre croissant de secteurs économiques basculent vers la déflation, un des exemples classiques étant celui des produits informatiques, sans cesse plus performants et moins chers.

 

Des facteurs déflationnistes durables

"Ce phénomène s'explique par certains forces fondamentales, détaille Gérard Moulin, responsable de la gestion actions d'Amplégest. D'un côté, l'Organisation mondiale du commerce a fait entrer dans le jeu de la compétition mondiale des pays à faible coût de main d'œuvre. De l'autre, il y a des facteurs sociologiques, avec des jeunes générations qui retrouvent le goût du troc et sont de plus en plus réticentes à payer pour de la musique ou des films. On peut ajouter à cela le développement de l'économie collaborative." Aux sites déjà anciens de vente d'objets d'occasion comme eBay sont venus s'additionner ces dernières années une foule de nouveaux modèles économiques permettant de louer des voitures ou du mobilier, voire de se prêter de l'argent entre particuliers. Déflationnistes, les nouvelles technologies ? Certainement, et ce n'est pas prêt de s'arrêter. "Le développement des imprimantses 3D aura clairement un effet déflationniste, poursuit Gérard Moulin. On va pouvoir fabriquer chez soi des objets et des métiers comme celui de prothésiste dentaire pourraient disparaître. Sans doute des constructeurs automobiles ou aéronautiques réinternaliseront-ils des activités qu'ils délèguent aujourd'hui à des équipementiers."

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De nombreux secteurs sous pression depuis longtemps...

La déflation touche de plein fouet un secteur comme la grande distribution. "D'abord, les consommateurs veulent trouver au supermarché des marques distributeurs et veulent les payer de moins en moins cher, remarque Gérard Moulin. Dans l'automobile aussi, la déflation est apparue depuis longtemps, les constructeurs offrant des crédits gratuits ou des options pour essayer de préserver leurs parts de marché. La percée des marques coréennes comme Kia ou Hyundai sur le marché européen témoigne de la difficulté des acteurs historiques. Dès qu'une entreprise a un genou à terre, c'est presque éliminatoire." Touché par la pression sur les prix due aux comparateurs de prix sur internet, le secteur du transport aérien, où le pouvoir de différenciation est faible et où la concurrence fait rage, est également sinistré. Un acteur aussi emblématique qu'Air France-KLM a ainsi accumulé les pertes depuis trois ans, même si celle de 1,8 milliard d'euros enregistrée en 2013 est surtout due à des dépréciations d'actifs.
On peut voir aussi la trace de la déflation dans le parcours boursier sur longue période des sociétés pharmaceutiques ou des opérateurs télécoms, traditionnellement considérée par les financiers comme des secteurs défensifs, c'est-à-dire peu risqués, par les investisseurs. "Entre fin 2003 et fin 2013, le cours Telecom Italia a baissé de 69,3%, un chiffre à comparer avec une hausse de 27,9% pour l'indice de la bourse de Milan (MIB), rappelle Gérard Moulin. Des sociétés comme Whatsapp, récemment rachetée par Facebook, exercent une pression terrible sur les marges d'acteurs comme Orange."

 

... et d'autres qui basculent

D'autres secteurs, un moment protégés, ont été touchés plus récemment par un effet de Un autre bon exemple est fourni par les jeux vidéo, où l'arrivée des jeux gratuits (encore un effet déflationniste). Le succès fulgurant de jeux comme Clash of Clans ou Candy Crush a brutalement propulsé en 2013 leurs créateurs respectifs, les sociétés Supercell et King Digital Entertainment loin devant le français Gameloft, pourtant présent depuis 1999 dans le jeu sur mobile. Une irruption qui illustre le fait que le statut de leader sectoriel peut être fragile, même si, dans le cas de Gameloft, Gérard Moulin continue de croire au potentiel de la société. "Gameloft reste selon nous une société à bon potentiel, rappelle-t-il. Le chiffre d’affaires de la société a doublé sur les 4 dernières années et son résultat net triplé. Nous estimons que sa croissance du chiffre d'affaires devrait être de 15% en 2014 et la croissance du résultat de 50%. Le succès des uns n’empêche ainsi pas le succès spectaculaire des autres."

Si la déflation ne s'est pas propagée à l'ensemble de l'économie, c'est peut-être parce que certains secteurs résistent, comme le luxe, avec des entreprises comme Ferragamo ou LVMH ou les métiers de la certification (Bureau Veritas, Eurofins), où les barrières à l'entrée sont fortes. "Il y a aussi des sociétés qui savent résister au sein d'un secteur déflationniste, comme le spécialiste des paiements électroniques Ingenico", note Gérard Moulin. Quoi qu'il en soit, la vocation première de la Banque centrale européenne (BCE) - la lutte contre la hausse des prix - semble aujourd'hui sans objet, avec une inflation contenue bien en-deçà de l'objectif de 2%. C'est sans doute plus du côté de la croissance trop faible que se situe le problème. Et en évoquant récemment le niveau trop élevé de l'euro, Mario Draghi, président de la BCE, semble bien vouloir infléchir la mission de l'institution.

 

Emmanuel Schafroth