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Journalisme d'investigation : un "luxe" pas toujours couronné de succès

L'affaire Cahuzac place sous le feu des projecteurs les journalistes d'investigation, dont les enquêtes longues et difficiles font figure de "luxe" dans la profession et n'aboutissent pas toujours en France à la démission des personnalités éclaboussées. Avant de publier son article en décembre, Fabrice Arfi du site Mediapart a travaillé sur le dossier Cahuzac pendant quatre longs mois, une particularité qu'on retrouve rarement dans les autres médias à une période où l'instantanéité de l'information fait loi. "Quel journal peut consacrer trois-quatre mois de salaires d'un journaliste à plein temps sans garantie de résultat ? Dans les rédactions, les services de journalisme d'investigation tendent à se réduire", relève Louis-Marie Horeau, rédacteur en chef du Canard Enchaîné. "Le journalisme d'investigation est un luxe malheureusement", ajoute-t-il, soulignant qu'on peut travailler longtemps sans rien sortir au bout du compte. De plus, ces enquêtes au long cours ne prennent pas seulement beaucoup de temps, elles sont aussi délicates à mener. L'affaire Cahuzac "pose plus de questions pour les journalistes d'enquête qu'elle n'apporte de réponses: jusqu'où on peut aller ? Avec quels éléments ? On n'a pas de réponse", estime Gérard Davet, du Monde, qui a notamment enquêté sur l'affaire Bettencourt. Les critères essentiels restent la "rigueur, la mise en perspective, la vérification, la non utilisation du off", ajoute-t-il, se montrant "très circonspect sur l'utilisation d'enregistrements clandestins qui pose un problème éthique". Le site d'information Mediapart s'est appuyé sur un enregistrement présenté alors comme celui de la voix de Jérôme Cahuzac pour affirmer le 4 décembre que le ministre du Budget avait clôturé en 2010 un compte en Suisse pour en transférer les avoirs à Singapour. Beaucoup de médias s'étaient alors montrés prudents, jugeant insuffisamment probants les éléments présentés par le site d'informations et réclamant des "preuves" à Fabrice Arfi et à Edwy Plenel, fondateur et président de Mediapart. "Il n'y a pas de sources parfaites et les sources sont toujours intéressées", dit Gérard Davet. Pas un justicier Mathieu Aron, directeur de la rédaction de France Inter, estime pour sa part qu'il y a "une forme de frilosité chez les journalistes à enquêter, à aller au-delà du discours officiel". Enfin, si les révélations des journalistes d'investigation ne sont pas sans conséquences pour les personnalités visées, elles remettent rarement en cause la carrière de ces dernières en France. "En Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, quand un politique est remis en cause, il démissionne. Jérôme Cahuzac ne serait pas resté aussi longtemps au gouvernement aux Etats-Unis", estime M. Davet. "Dans toutes les autres démocraties, lorsqu'il y a révélation d'une affaire, le politique tombe. En France, dans la majorité des cas, il ne tombe pas", renchérit Patrick Eveno, historien des médias. Il estime que "ce sont les seconds couteaux politiques qui démissionnent". "On peut avoir des casseroles et être réélu. L'opinion publique française ne sanctionne pas les hommes corrompus", juge-t-il. Plusieurs enquêtes du Canard Enchaîné ont malgré tout obligé des politiques à démissionner de leurs fonctions gouvernementales : Hervé Gaymard (logement de fonction luxueux), Alain Joyandet, Christian Blanc (train de vie) ou Michèle Alliot-Marie (vacances en Tunisie en 2010 en pleine révolte). Mais le journaliste d'enquête ne doit pas se vivre "comme un justicier", dit Elisabeth Fleury, du service investigation du Parisien. "A partir du moment où tu fais ton boulot et sors ton information, c'est le pied. Après, ce qu'en font les politiques ou la justice, ce n'est plus ton affaire", ajoute-t-elle, renvoyant les politiques à leur "sens moral". "Ce n'est pas aux journalistes de dire qui doit démissionner", tranche M. Horeau, du Canard.