"EDF rêvait du marché chinois", la lanceuse d'alerte d'Areva revient sur un scandale d'Etat
INTERVIEW. Challenges s'est entretenu avec Maureen Kearney, l'ancienne déléguée CFDT d'Areva agressée en 2012 alors qu'elle révélait des transferts de technologies de la France vers la Chine concernant la filière nucléaire. Son histoire racontée dans La Syndicaliste, et portée par Isabelle Huppert, sort en salles ce mercredi 1er mars.
Sorti le 1er mars, le film La Syndicaliste de Jean-Paul Salomé, tiré du livre enquête éponyme de la journaliste Caroline Michel-Aguirre, raconte l’histoire vraie de Maureen Kearney (interprétée avec justesse par Isabelle Huppert), ex-déléguée CFDT d’Areva, violemment agressée à son domicile alors qu’elle dénonçait un secret d’Etat.
Le film retrace avec sensibilité le parcours d’une combattante dont la vie bascule quand la police l’accuse d’avoir tout inventé, avant qu’elle soit réhabilitée en justice. La CFDT l’a toujours crue et a payé ses frais d’avocats. Après l’affaire, Maureen Kearney (67 ans) n’a jamais remis les pieds chez Areva.
Challenges. Quel est ce secret qui vous a valu de devenir lanceuse d’alerte?
Maureen Kearney. En octobre 2011, j’ai reçu chez moi une lettre anonyme. Elle contenait un protocole d’accord de 2010 entre EDF et son homologue chinois, CGN, pour s’associer dans leurs futurs projets de centrales nucléaires en France, en Chine et dans le monde. L’entreprise chinoise exigeait des transferts de technologies. Sauf qu’à l’époque ces technologies appartenaient à Areva. EDF ne faisait que construire et exploiter les centrales. Le Premier ministre François Fillon a bloqué l’accord in extremis. Mais j’ai appris que les négociations continuaient.
Pourquoi EDF tenait-il tant à cet accord avec les Chinois?
La Chine projetait de construire 200 centrales dans les trente prochaines années, un marché de plus de 200 milliards d’euros. Ça valait bien de céder quelques technologies, d’autant que cette manœuvre affaiblirait Areva, un rival encombrant alors qu’EDF se voulait le seul porte-drapeau du nucléaire français à l’international.
Ces tractations en coulisses vous ont poussé à sonner l’alarme?
Nous avions peur pour la sauvegarde de notre savoir-faire et donc de nos emplois! Nous avons exprimé ces craintes auprès de Luc Oursel, le PDG d’Areva, mais il m’a envoyée promener. J’ai envoyé mille lettres à tous les députés et sénateurs, j’ai rencontré une quar[...]
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