Discours du 9 mai: le cynisme de Poutine qui oublie tout un pan de l'histoire
EDITORIAL - Que Vladimir Poutine rende hommage aux victimes soviétiques de 1941 à 1945 sous l'occupation nazie, cela s'entend. Qu’il transforme en revanche l’invasion de l’Ukraine, l’année dernière, en nouvelle saison de la "grande guerre patriotique" contre les "nazis ukrainiens" démontre un certain cynisme quant à la réalité historique.
Le cynisme de Vladimir Poutine est vertigineux. Qu’il rende hommage le 9 mai aux 26 millions de victimes soviétiques civils et militaires de 1941 à 1945 sous l’occupation nazie, c’est bien le moins pour un chef d’Etat russe. Même s’il aurait pu saluer au passage les quelque 9 millions de cadavres ukrainiens… Qu’il transforme en revanche l’invasion de l’Ukraine l’année dernière en nouvelle saison de la "grande guerre patriotique" contre les "nazis ukrainiens" illustre cet art totalitaire de l’inversion méthodique du sens des mots si bien décrypté par Georges Orwell: l’agressé devient l’agresseur, la guerre devient la paix…
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Ce bonneteau sémantique est consubstantiel à un système qui vide en permanence les tripes de la vérité historique jusqu’à supprimer, il y a un an, l’association indépendante Mémorial fondée en 1989 par Sakharov. Du grand roman impérial poutinien monté de bric et de broc et de beaucoup d’encens, il ressort que malgré les traitres qui pullulent, malgré l’étranger occidental, les maitres du Kremlin sont des commandeurs infaillibles. Des possédés du Très haut. De Staline à Poutine et inversement….
Deux années où l’Europe va vivre sous condominium germano-russe
Disons-le brutalement: les gigatonnes de sang versé par des millions de moujiks et de soldats de 1941 à 1945 ne sauraient absoudre la conduite de Staline vis-à-vis d’Hitler d’août 1939 à juin 1941. Deux années où l’Europe va vivre sous condominium germano-russe, où la France, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, le Danemark, la Norvège s’effondrent et passent sous contrôle du IIIe Reich. Deux années où Moscou et Berlin se partagent la Pologne. Deux années où la Russie soviétique se voit octroyer la Finlande, les Pays baltes et la Bessarabie…
On parle pudiquement dans les livres d’histoire de pacte de "non-agression". Le procureur soviétique Rudenko osait même cette version baroque le 8 février 1946 à Nuremberg quand il dénonce "l’attaque des[...]
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