Credit Suisse: le rachat "incompréhensible" d'une banque "sulfureuse", juge Michel Santi

ROMAIN DOUCELIN/SIPA

INTERVIEW - Le rachat de Credit Suisse par UBS interroge le secteur bancaire mondial. Cette fusion forcée ne laisse désormais plus qu'une seule grande banque dans la nation helvétique. Le gouvernement suisse pouvait-il faire autrement? Quelle est désormais la place de la Suisse sur la scène bancaire internationale? Michel Santi, économiste franco-suisse, ancien conseiller de plusieurs banques centrales et auteur d'un livre-enquête sur la Banque nationale suisse, nous livre son analyse.

Le rachat de Credit Suisse par UBS le 19 mars dernier était la seule "solution réalisable" dans un court laps de temps. Lors d'une conférence de presse jeudi, le président de la banque centrale suisse a tenté de rassurer les investisseurs et les marchés. Si des questions de concurrence vont se poser après ce rachat, la priorité pour lui était de maintenir la stabilité du système financier.

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Beaucoup s'interrogent pourtant en Suisse quant à savoir pourquoi les autorités n'ont pas plutôt opté pour une vente à une banque étrangère ou une faillite ordonnée qui aurait laissé le temps de redresser les actifs sains de Credit Suisse et liquider les autres.

Michel Santi, économiste franco-suisse et ancien conseiller de plusieurs banques centrales, nous livre son analyse.

Challenges - Que pensez vous du sauvetage de la banque Credit Suisse?

Michel Santi: Ce sauvetage a été organisé à la hâte par une sorte de triumvirat ou de Directoire à la transparence fort douteuse, dans le but de renflouer une banque qui avait commis toutes sortes d'abus dans le passé et qui s'était impliquée dans des opérations spéculatives à outrance. Pour mémoire, voilà depuis une quinzaine d'années que le Credit Suisse paie des centaines de millions d'euros et de dollars d'amendes: près de 3 milliards de dollars pour évasion fiscale aux États-Unis depuis 2014, 5,5 milliards en 2021 pour exposition trop risquée au fond Archegos, 10 milliards en 2021 avec l'effondrement d'un autre produit appelé Greenville, non sans avoir plaidé coupable en 2022 pour avoir fraudé des investisseurs sur un prêt de 850 millions de dollars…

Bref, il est incompréhensible que la Confédération helvétique ait mené une opération si délicate en vue de sauver une banque à la réputation sulfureuse. Qui plus est à la hâte, car des erreurs graves dans leurs conséquences ont été commises dans le cadre de ce sauvetage. On peut citer par exem[...]

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