Comte-Sponville: "Jeudi, j’ai eu honte d’être français"
EDITORIAL. Le recours au 49-3 sur les retraites et le débat lamentable à l’assemblée, laissent craindre le pire pour la suite du mandat d'Emmanuel Macron.
Le recours au 49.3 marque assurément un échec du gouvernement, donc aussi d’Emmanuel Macron. Elisabeth Borne et lui n’ont pas réussi à convaincre une majorité de députés de la nécessité et de la justesse de cette réforme, pas plus qu’ils n’avaient réussi à en convaincre une majorité de Français, dont je comprends et partage au moins certaines des réticences.
Sans prétendre faire la leçon à quiconque, tant c’est un dossier que je maîtrise mal, j’aurais préféré, quant à moi, que le chef de l’État prenne le risque de soumettre ce projet de loi au vote du Parlement, quitte à dissoudre l’Assemblée si le texte ne passait pas : cela offrait au moins une chance de victoire (les observateurs s’accordaient à juger le succès un peu plus probable que l’échec), aurait redonné la parole au peuple, comme il convient dans une démocratie, et nous eût épargné à tous les quatre années de quasi-paralysie que l’on peut redouter.
"Ce n’était pas possible, m’objectent certains, car en cas d’échec les marchés et l’Europe y auraient vu une nouvelle preuve de l’incapacité de la France à se réformer : nos taux d’emprunt se seraient envolés, rendant la charge de la dette écrasante, voire ingérable." N’étant pas économiste, je me garderai bien de rejeter l’argument, assurément respectable (on ne pourrait se désintéresser des taux que si notre budget était à l’équilibre, ce qui n’est pas arrivé depuis plus de 40 ans) et qui fut peut-être décisif. Mais cela ne me rassure pas concernant les quatre années qui viennent.
La France et la gauche méritent mieux
Que faire ? Un projet de loi sur la fin de vie, légalisant enfin l’aide active à mourir ? J’y suis favorable depuis longtemps, mais cela ne contribuera guère à réconcilier les Français, divisés là-dessus comme ils le sont sur tout. Quelques grandes lois, par exemple sur le travail, la transition énergétique ou l’immigration ? Cela vaudrait mieux, en tout cas, que l’immobilisme. Mais avec quelles chances, à chaque fois, d’obtenir une majorité au [...]
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