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Carrefour/Couche-Tard-Le "non courtois" du gouvernement français interroge

CARREFOUR/COUCHE-TARD-LE "NON COURTOIS" DU GOUVERNEMENT FRANÇAIS INTERROGE

par Dominique Vidalon, Michel Rose et Gwénaëlle Barzic

PARIS (Reuters) - Les réticences du gouvernement français sont en passe de tuer dans l'oeuf l'éventuelle prise de contrôle de Carrefour par le groupe canadien Alimentation Couche-Tard, au nom d'une sécurité alimentaire nationale élevée au rang de priorité absolue.

"Pour résumer ma position, c'est un 'non' courtois, mais clair et définitif", a déclaré vendredi sur BFM TV le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, réitérant un refus déjà exprimé peu après la confirmation par Carrefour, mercredi, que des discussions "très préliminaires" étaient en cours avec le groupe canadien qui a offert de racheter le distributeur français au prix de 20 euros par action.

"Nous ne sommes pas favorables à cette opération, nous le disons avec beaucoup de respect pour Couche-Tard, pour Carrefour et pour tous ces opérateurs qui sont de grande qualité", a ajouté Bruno Le Maire..

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Carrefour n'a fait aucun commentaire sur ces propos dans l'immédiat.

Cette intervention gouvernementale pour la défense d'un secteur qui n'était pas considéré jusqu'ici comme un trésor national a suscité l'inquiétude de certains milieux d'affaires.

Elle pourrait ternir l'image pro-entreprise du président Emmanuel Macron, estiment des observateurs, tandis que d'autres soulignent que la crise du COVID-19 a contraint plus d'un pays à revoir les contours de ses intérêts stratégiques.

Le premier ministre canadien Justin Trudeau dit s'être entretenu avec le président français cette semaine et a promis de continuer d'oeuvrer au succès des entreprises canadiennes dans le monde.

La promptitude du refus gouvernemental a surpris jusqu'au sein de Carrefour, selon une source proche du dossier. Même étonnement quant à la rhétorique utilisée côté canadien, ont rapporté des proches du groupe Couche-Tard.

UN ÉCHEC JUGÉ PROBABLE

Même si les discussions se poursuivent, un échec des négociations semblait vendredi l'issue la plus probable, ont dit à Reuters plusieurs personnes au fait des pourparlers.

Le ministre de l'Economie du Québec, Pierre Fitzgibbon, a déclaré à la presse qu'il parlerait à Bruno Le Maire dans la soirée de vendredi, heure de Paris.

La pandémie a placé les supermarchés sur le devant de la scène dans un monde en partie confiné, où ils sont devenus du jour au lendemain des lieux essentiels où se procurer des produits aussi basiques que des pâtes et du papier toilette.

Carrefour représente toutefois un peu moins de 20% du marché français, derrière des rivaux comme Leclerc, ce qui fait douter de son caractère stratégique.

"C'est un argument qui semble un peu léger (...) nous ne sommes plus le numéro un de la distribution alimentaire et nous ne parlons pas d'un secteur industriel", a déclaré Michel Enguelz, délégué Force ouvrière des hypermarchés Carrefour.

INQUIÉTUDES POUR L'EMPLOI

Le syndicaliste s'inquiète avant tout pour l'emploi - avec environ 105.000 salariés, Carrefour est le premier employeur privé du pays et un acquéreur pourrait prendre des décisions radicales en la matière.

Pascal Dupeyrat, lobbyiste français spécialisé sur les investissements dans les secteurs stratégiques chez Relians, juge lui aussi que l'emploi est probablement la préoccupation majeure du gouvernement à l'approche de l'élection présidentielle du printemps 2022.

"Le ministre de l'Economie n'a pas envie de voir passer sous contrôle étranger le premier employeur de France à un an de la présidentielle", dit-il. "Il n'avait pas envie d'avoir ce caillou dans la chaussure."La France a longtemps jalousement défendu ses intérêts, une ligne adoptée par Emmanuel Macron, un ancien banquier d'investissement, à son arrivée au pouvoir en 2017. Peu après son entrée à l'Elysée, le président a poussé à renégocier l'accord de rachat des chantiers navals français par l'Italien Fincantieri. Lorsqu'il était ministre de l'Economie, il avait supervisé des ventes comme celle du groupe de télécommunications Alcatel à Nokia, qui s'est soldée par des suppressions d'emplois. L'affaire Carrefour-Couche-Tard pourrait ruiner les efforts déployés pour séduire les fonds internationaux lors de sommets du type "Choose France".

"Je me rejouis d'une certaine manière de voir le réveil d'un certain patriotisme économique mais je m'interroge franchement sur la lisibilité de la ligne du gouvernement", estime le député Les Républicains (LR) Olivier Marleix.

Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, est sévère. "Franchement que la grande distribution soit érigée au niveau de la souveraineté alimentaire les bras m’en tombent", dit-il. "Le gouvernement fait tout à l’envers. Il protège ce qui n’a pas lieu de l’être et il ne protège pas ce qu’il doit l’être".

Le Medef juge quant à lui "précipité de refuser cette opération a priori sans en connaître le détail et en particulier les engagements que serait prêt à prendre Couche-Tard.""Nos entreprises achètent régulièrement des entreprises à l’étranger : il ne faut pas que la place de Paris tombe dans un protectionnisme qui empêcherait ces opérations à l’étranger", prévient l'organisation patronale. Le Français Alstom a récemment conclu un accord pour racheter l'activité ferroviaire de son rival canadien Bombardier Inc . Le rapprochement entre Couche-Tard et Carrefour n'a jamais pleinement convaincu investisseurs et analystes, qui s'interrogent sur l'absence de cohérence géographique entre l'exploitant de stations-services nord-américain et le plus grand groupe de vente au détail d'Europe continentale. L'action Carrefour a reculé vendredi de 2,87% tandis que Couche-Tard progressait d'environ 1% au Canada.

(Dominique Vidalon, Benoit Van Overstraeten, Michel Rose, Elizabeth Pineau, Gwenaelle Barzic et Sarah White à Paris, Pamela Barbaglia à Londres, avec la contribution de Nicolas Delame, Blandine Hénault, édité par Jean-Michel Bélot)