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Avant #Anti2010, certains enfants nés en 2000 ont aussi été harcelés pour leur année de naissance

Un collégien avec ses affaires scolaires (photo d'illustration) - Wokandapix- CC
Un collégien avec ses affaires scolaires (photo d'illustration) - Wokandapix- CC

Comme un air de déjà-vu? Si une virulente campagne de dénigrement à l'encontre des enfants nés en 2010 - c'est-à-dire qui viennent d'entrer en 6e - sévit sur les réseaux sociaux, entraînant des moqueries et des insultes bien réelles dans les collèges, certains élèves nés en 2000 semblent avoir vécu la même situation.

Sur les réseaux sociaux, en commentaire de l'article de BFMTV.com, nombreux sont les internautes à rappeler qu'en 2000 un phénomène similaire s'était produit. "On en parle des 2000?", s'interroge l'un. "À mon époque c'était les 2000", écrit un autre. "Les 2000 étaient aussi traqués", poursuit un internaute. "Idem pour les 2000" ou "c'est pas nouveau, avant ça c'était les 2000 qui se faisaient harceler".

Certains l'évoquent avec une certaine légereté: "Chacun son tour, c'est les 2000 qui prenne (sic) leur revanche" ou "Mdr on a toujours fait ça, on faisait ça avec les 2000 quand j'étais au collège/lycée". "Quand nous étions ado (sic) c'était les 2000 qui prennait (sic) chère (sic)."

"Je l'ai très mal vécu"

Sarah J. est loin de l'avoir vécu avec autant de détachement. "Ça a duré pendant toute ma scolarité", témoigne cette étudiante lilloise en master management de la santé, née en 2000, auprès de BFMTV.com. "C'était des moqueries qui engendraient d'autres moqueries." Et pour le prétexte le plus insignifiant: un geste, une parole, la couleur d'un vêtement...

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"J'étais visée parce que j'étais née en 2000. Je l'ai très mal vécu. Tu deviens une chose. Les plus grands commençaient puis tout le monde s'y mettait. C'était du: 'ah, t'es une 2000' ou 't'approche pas d'elle, c'est une 2000'. De la méchanceté pure et dure."

La fillette a beau en parler à sa mère, à l'époque, rien ne bouge. Du côté du personnel de son établissement scolaire, la chose semble banalisée: "Les profs pensaient que c'était un jeu alors que c'était du harcèlement". Sarah J. va de plus en plus mal.

"Je me suis retrouvée en échec scolaire. Quand vous arrivez en cours et qu'on vous insulte de tous les côtés alors que vous êtes à peine arrivée au collège depuis cinq minutes, que tout le monde est contre vous, allez vous concentrer... En un an, je suis passée de 14 à 9/20 de moyenne."

"C'est une marque rouge"

Ses quatre années de collège sont un enfer. La situation s'améliore à peine au lycée. "Ça a continué", se rappelle Sarah J. Des petites moqueries, "tout le monde y allait quand même de bon train".

Les "Ah, t'es une 2000?" se poursuivent, des réflexions "pleines de sous-entendus" que la jeune fille ne supporte plus. La maturité et des séances avec un psychologue l'aideront à dépasser le traumatisme, bien qu'elle assure conserver des séquelles. Aujourd'hui encore, la jeune femme de 21 ans confie souffrir toujours d'une forme de stigmatisation liée à son année de naissance.

"En soirée, avec des amis d'amis, si on apprend que je suis une 2000, c'est 'au revoir'. En gros, si t'es une 2000, t'es une merde. Un 99 ou un 2001 est forcément mieux que toi. En soirée, un garçon ne s'intéresserait jamais à une 2000, c'est un critère de couple. C'est une marque rouge. Il aura fallu dix ans pour qu'on en parle enfin."

"De la méchanceté gratuite"

Morgane, qui travaille dans un élevage d'animaux de compagnie à Saint-Étienne (Loire), est née en 1999. Si elle n'a pas été directement concernée par ces moqueries, insultes et humiliations qui visaient les élèves nés en 2000, elle y a cependant assisté. "J'ai redoublé ma 5e, du coup j'étais en classe avec eux, j'avais beaucoup d'amis nés en 2000", explique-t-elle à BFMTV.com.

Elle se souvient d'une ambiance glaciale dans les couloirs de son collège, de critiques incessantes à l'encontre de ses amis mais aussi d'humiliations commises par les élèves de 3e. La situation est même allée très loin et a tourné au drame.

"Dans le collège voisin du mien, une élève née en 2000, qui était harcelée pour cette raison, s'est suicidée. Le problème, c'est que personne ne s'est remis en question."

Sara, une hôtesse d'accueil née en 1997, se rappelle très bien de cette campagne de dénigrement. À l'époque, Facebook existait déjà, mais les réseaux sociaux n'étaient pas la caisse de résonance qu'ils sont aujourd'hui. "J'étais en 4e ou en 3e", raconte-t-elle à BFMTV.com. "Je me souviens qu'il y avait pas mal de choses qui tournaient. Autour de leurs passions, leurs tenues vestimentaires. C'était de la méchanceté gratuite."

Son compagnon, qui est né en 2000, a quant à lui eu la chance de faire plus que son âge et d'échapper à cette violence. "Il a vu beaucoup de ses camarades se faire harceler mais les parents avaient pu arriver à temps pour résoudre les conflits." Mais le jeune homme se souvient également que les années suivantes, certains de ces élèves harcelés de la génération 2000 sont à leur tour devenus des harceleurs. "Ils voulaient montrer qu'ils étaient devenus des caïds", rapporte sa compagne.

Faut-il voir dans les similitudes entre le harcèlement subi par les élèves nés en 2000 et ceux nés en 2010? Un même changement de décennie, un compte rond permettant de calculer l'âge plus facilement? Pour Margot Déage, docteure en sociologie qui a soutenu une thèse sur le cyberharcèlement, il est davantage question d'un sentiment d'appartenance chez les adolescents.

"Les ados cherchent à s'identifier à un groupe", analyse-t-elle pour BFMTV.com. "Que ce soit un quartier ou générationnel. C'est vrai que quand on parle de génération, on se réfère souvent aux années 90, aux années 2000, ça peut en effet rester dans l'esprit des jeunes. L'année de naissance met ainsi à distance."

"Ils étaient lynchés gentiment"

Morgane - une autre jeune femme que la précédente évoquée plus haut - née en 1999, n'en a donc pas été victime. "Mais je suis de fin d'année, ça s'est joué à peu", précise-t-elle pour BFMTV.com. Cette étudiante en école d'ingénieur automobile qui réside en Île-de-France évoque "une sorte de petite chasse aux 2000". "Rien de méchant", et rien qui ne dépassait alors les frontières du collège, minimise-t-elle aujourd'hui.

"C'était une petite guéguerre, des petites moqueries. Quand on apprenait que quelqu'un était un 2000, c'était 'je te parle plus' ou 't'es un bébé'. Ils étaient un peu mis de côté. Ils étaient lynchés gentiment."

Morgane ajoute cependant que le phénomène a perduré au lycée et jusque dans l'enseignement supérieur. Pour ceux qui y ont participé, il y avait l'idée que les élèves nés en 2000 n'étaient pas de la même génération, n'appartenaient pas au même siècle, voire au même millénaire que les autres.

"Dans leur tête, on passait de 1900 à 2000. Ça représentait un fossé. En fait, il fallait trouver quelque chose."

Gagner le respect

Mais pour la chercheuse Margot Déage, ce n'est pas le même mécanisme à l'œuvre pour les enfants victimes du phénomène #Anti2010.

"On s'en prend à eux d'abord parce que ce sont des 6e", pointe la sociologue. Les enfants qui subissent le plus d'insultes, qui sont les plus mis à l'écart et qui reçoivent le plus de coups sont les 6e."

Sans compter que cette année, c'est bien l'usage d'un jeu vidéo qui semble à l'origine du problème. "C'est d'abord parti de là plus que de l'année de naissance. Il a été décrété que les 2010 ne savaient pas jouer à Fortnite, que les plus anciens jouaient à Call of Duty par opposition à Fortnite, ce qui n'est pas forcément vrai d'ailleurs." Et symboliquement, le jeu vidéo fait particulièrement sens chez les adolescents.

"Dans le cadre de mon enquête, j'interrogeais des élèves sur 'comment se faire respecter au collège' - les collégiens parlent beaucoup de la notion de respect. Un élève de 5e m'a répondu que pour gagner sa place, il fallait soit savoir se battre, jouer au foot ou jouer aux jeux vidéos."

Si les brimades existent toujours, en dix ans, les dispositifs de lutte contre le harcèlement se sont cependant développés. Si un élève est victime, lui ou ses proches peuvent contacter le 3020, un numéro d'écoute et de prise en charge gratuit, accessible du lundi au vendredi, sauf jours fériés, de 9h à 20h et le samedi de 9h à 18h.

Article original publié sur BFMTV.com